Inspiration
Vaste Horizon, la maison d’hôtes selon Anne Carpentier
Depuis quelque temps déjà, Anne Carpentier gravite autour de The Socialite Family. Ses recommandations sont aussi sûres que son goût et son amour pour l’art, qu’elle a décidé de mêler au cœur de sa nouvelle acquisition : Vaste Horizon. Une maison (la sienne) d’hôtes, prolongement de sa galerie du même nom. Dans le quartier de la Roquette, ce lieu est unique en son genre. Allure XVIIIᵉ, détails XIIIᵉ et décoration dont l’exquise curation est à emporter. S’il ne faut pas oublier un élément en passant les portes de l’antique demeure de la famille Bibion – à qui l’on doit le nom de la rue abritant Vaste Horizon – c’est Anne elle-même. Anne la passionnée, qui a donné à son projet le nom de l’hôtel de Mougins qui abrita les premières amours de Dora Maar et Pablo Picasso. Anne l’engagée, qui met un point d’honneur à transformer cet endroit en une place bouillonnante de rencontres et d’émulations créatives. Anne la douce, qui, portée par David, s’acharne à conserver jour après jour pour ses invités l’ambiance « pension de famille », qui, au temps de son précédent propriétaire, a fait sa renommée. Une volonté relevée avec brio grâce à quatre chambres – et autant d’espaces – construits à l’inverse des tendances actuelles où seul « l’utilement beau » a sa raison d’être. Après tout, nous sommes à Arles. Que nous faut-il de plus ?
Vaste Horizon, 11 rue Bibion – 13200 Arles. Réservations par téléphone au 06.84.86.81.42 et par e-mail à www.vastehorizon.com
texte
Caroline Balvay
Photographies et Vidéos
Valerio Geraci
TSF
Anne, qui êtes-vous ? Quel est votre parcours ?
Anne
Je suis maman d’un futur comédien ou politicien, Darius 8 ans et demi, mais aussi une grande amoureuse de l’art et d’Arles. J’ai quitté ma vie parisienne pour m’installer ici. Mon ami a lâché à son tour son poste de tapissier au Louvre pour me rejoindre ! J’ai ouvert une galerie, Vaste Horizon et tout récemment nous avons repris cette maison d’hôtes, pour un nouveau et « Vaste Horizon ».
TSF
Comment vivez-vous l’explosion culturelle et touristique qu’Arles traverse actuellement ?
Anne
Je suis au cœur et ça détone ! C’est stimulant d’assister à ce bouillonnement culturel permanent, qui a lieu chaque jour, à chaque coin de rue, à chaque coin de table. Arles attire des personnalités au caractère aussi fort que leur pouvoir d’imagination et leur envie de changer le regard que l’on porte sur le monde.
TSF
À l’année, quels sont les temps forts de la capitale de la Camargue ?
Anne
Il y a Les Rencontres d’Arles, bien sûr, mais plus seulement. Chaque mois a son lot d’événements. En juillet, il y a les festivals Les Escales du Cargo et Les Suds. En septembre Été Indien(s), ce marché du collectionneur qui fêtera sa deuxième édition à l’aube de l’automne, la Feria du riz aussi. Puis il y a les fêtes de Noël provençal et bientôt, la réouverture du Museon Arlaten ainsi que l’inauguration de LUMA.
TSF
Parlez-nous de votre galerie, Vaste Horizon. Quelle est sa philosophie ?
Anne
Donner à voir des artistes inconnus et proposer des lectures nouvelles de ceux qui ne le sont plus. La galerie est ainsi l’occasion de mettre en scène des conjugaisons d’œuvres, par-delà les siècles, la géographie et les genres, dans le seul but de titiller la curiosité du visiteur tout en jouant de clins d’œil à l’histoire de l’art.
TSF
De quelle manière réalisez-vous sa curation ?
Anne
Je m’amuse à raconter des histoires d’histoire de l’art. Par exemple, j’ai exposé une série de dessins paysages de Dora Maar aux côtés de sa mobylette (prêtée par la Maison Dora Maar), parce que j’imagine qu’ils ont fait partie des carnets de dessins qu’elle mettait dans les sacoches de cet engin pour aller dessiner sur le vif, comme Van Gogh un siècle avant. A également animé cette exposition mon amie Céline Pujol, qui a tout spécialement réalisé pour l’occasion une performance nommée « Poèmes dansés ». Ou une danse inspirée par des poèmes de l’artiste. L’été dernier, je présentais « Blocs Party », une exposition avec des œuvres de Kalou Dubus et de Fred Lebain exposés pour la première fois ensemble dans une scénographie dessinée par Pascal Humbert et François Joos.
TSF
Le décor de Vaste Horizon, votre maison d’hôtes, en est-il le prolongement ?
Anne
Cette maison est un nouveau prétexte aux expositions d’œuvres, dans le contexte précis de l’intérieur, avec l’idée d’un décor à emporter. Nous y retrouvons les pièces des artistes que j’ai exposés dans la galerie, mais dans le cadre de cette vieille maison arlésienne que nous avons souhaité conserver. L’ambiance « pension de famille », entre art et quiétude, était recherchée et préservée par les habitués du lieu (nous avons reçu des appels nous demandant de ne rien changer !). Mais quand les pièces sont belles, elles trouvent toujours une place.
TSF
Comment ce (nouveau) projet est-il né ?
Anne
Nous cherchions juste une maison plus grande. Nous sommes tombés sur cette maison d’hôtes, investie par un vieil antiquaire, qui dorlotait sa clientèle à base de pièces de sa collection et de petits verres de rosé offerts dans sa cour. Nous avons adoré l’esprit de la maison, à mille lieues des tendances, sans snobisme ni sophistication, au cœur des belles et simples choses. Et puis on y dort bien, surtout !
TSF
Pourquoi ce nom, « Vaste Horizon » ?
Anne
Le nom est un clin d’œil à l’hôtel de Mougins qui abrita les premières amours de Dora Maar et Pablo Picasso. Ils y ont passé leurs étés de 1936 à 1938 avec leurs amis Man Ray, Nush et Paul Éluard, Roland Penrose et Lee Miller, Brassaï… J’adore regarder les photos prises par Dora Maar et Man Ray où on les voit jouer sur la plage ou réunis autour d’une table sous les canisses. Vous imaginez les discussions ?!
TSF
Votre établissement est-il – plus qu’un hôtel – un lieu de rencontres, d’émulations à Arles ?
Anne
Totalement. Le temps de la galerie est trop court pour favoriser l’échange entre le collectionneur et l’artiste. Celui de la maison d’hôtes est un prolongement de ce temps, dans la décontraction.
TSF
Quelle pièce de la collection The Socialite Family pourrait venir animer, décorer cet intérieur pensé par vos soins ?
Anne
La lampe à poser Gioia couleur vert amande, délicieusement rétro. Elle semble provenir d’un palais italien, qu’un riche industriel milanais aurait fait rénover…
TSF
Quelles adresses recommanderiez-vous spontanément à des clients désirant visiter votre ville, ses alentours ?
Anne
La Chassagnette, d’Armand Arnal. Une expérience gastronomique totale, comme un opéra, en Camargue. Scaramouche, le glacier de la place Paul Doumer pour son sorbet kumquat. Le bar de l’hôtel Nord-Pinus, une ode au glamour. Et puis le magasin Moustique. On se pique toujours d’une lampe Sagne fabriquée maison, d’un bijou Santibelli ou d’une assiette dessinée par Roxane Lagache.