Familles
Cachée dans une impasse parisienne, une cabane perchée familiale et joyeuse
Chez
Virginie Godard, Hugues Lecomte et Sacha, 5 ans et demi
Perché au faîte d’un immeuble lui-même niché dans une belle impasse de l’est parisien, cet appartement familial prend des airs de cabane joyeuse. Le ton est donné : poêle ancien, escalier en colimaçon et cuisine ouverte sur la grande terrasse qui domine Paris sont autant d’indices quant au mode de vie du trio. Virginie Godard, fondatrice de l’agence LFM, Hugues Lecomte, ébéniste, et leur fille Sacha sont de ceux pour qui la cuisine est la pièce centrale d’une maison et la maison, faite pour recevoir. C’est d’ailleurs le cœur de métier de Virginie Godard, qui officie à deux pas de chez elle. L’agence LFM se spécialise dans la gastronomie sous toutes les coutures, du traiteur au conseil stratégique. Nous aussi, nous avions cédé à son charme le temps d’un cocktail pétillant d’originalité à l’occasion de notre lancement de collaboration avec l’artiste Thomas Lélu. De quoi nous donner envie de mieux connaître la fondatrice de l’agence, qui se décrit comme amatrice de beau et de bon. Et de joie, ajouterait-on. Le temps d’un entretien, The Socialite Family a pris un peu de hauteur et un shot de bonne humeur.
Lieu
Paris
texte
Elsa Cau
Photographies et Vidéos
Valerio Geraci
TSF
Virginie, Hugues, qui êtes-vous ?
Virginie
Je suis une amoureuse du bon et du beau. C’est ce qui me définit dans tous les domaines de ma vie : professionnel, personnel…
Hugues
Je suis quelqu'un qui n’arrive pas du tout à répondre à cette question (rires).
TSF
Quel est votre parcours à chacun ?
Hugues
J'ai poursuivi des études de génie industriel dans le sud de la France. Après, j'ai complètement fait autre chose : de la restauration pendant 15 ans. J'ai eu mes propres restaurants à Valence. Ensuite, je suis parti quelques années en Suisse, à Lausanne, où j'ai aussi ouvert des restaurants. Je suis arrivé à Paris il y a sept ans. J'ai été directeur à l'Hôtel Particulier de Montmartre, puis je suis je suis allé au restaurant La Vierge de la Réunion dans le XXe arrondissement. Et puis le confinement est arrivé, j'ai complètement arrêté, comme beaucoup de gens, et... Je me suis reconverti en menuisier.
Virginie
Pour ma part, j'ai fait une école d'arts appliqués puis de graphisme. Mon parcours a été jalonné de rencontres : très jeune, j'ai travaillé avec une créatrice de mode, Irina Volkonski, la muse de Jean-Charles de Castelbajac, une fille qui avait des cheveux orange ! Du graphisme, je suis ensuite passée aux mises en scène de ses collections, puis, elle m'a mise sur les salons en Europe où je suis devenue sa commerciale. Ensuite, j'ai bossé dans la mode. La directrice du salon Première Classe, m'a repérée et je suis devenue responsable de la sélection. J'allais dégoter les nouveautés des accessoires : sacs, bijoux, chaussures. C'était super, parce qu'il s'agissait d'une mode d'artisan. Pendant sept ans, je suis allée chercher des pépites dans le monde entier. J'ai fini directrice artistique des salons : je m'occupais des campagnes de communication, notamment. On a aussi créé un salon, Don't believe the Hype, intégré à Première Classe. On a fait entrer un restaurant - le premier Spock de Christophe Juville - au milieu du salon et tout le monde s'est plaint, mais c'était finalement assez avant-gardiste ! (Rires) Maintenant, c'est plutôt une évidence. Et puis, j'ai eu 30 ans, j'ai eu envie aussi de me prouver que je pouvais faire quelque chose par moi-même. J'avais toujours été passionnée de nourriture et de vin. J'ai monté le Food Market l'année suivante : un marché et une cantine dans Paris avec des stands. En 2025, on fêtera nos dix ans ! En parallèle, j'ai monté l'agence LFM, qui part du constat que le message des marques doit passer par la nourriture. À l'époque, je me rendais à des soirées dans lesquelles on en était encore au combo coupe de champagne et verrine. L'agence LFM devait proposer l'avant-garde de ce qui se déroulait sur la scène gastronomique. Puis les activités se sont diversifiées.
TSF
Comment êtes-vous devenu menuisier, avec une formation, en autodidacte ?
Hugues
De façon complètement hasardeuse (rires). J'ai beaucoup lu sur le sujet et surtout, j'ai travaillé avec des menuisiers pour me former sur le tas. Maintenant, je travaille dans un atelier partagé de Romainville, on est trois. Un artiste et un ébéniste qui partage beaucoup ses connaissances et sa pratique avec moi. L'objectif à long-terme, c'est d'avoir mon atelier et de créer sur commande.
Virginie
Tu fais aussi des montages de vitrines !
Hugues
Oui, avec Laurent, mon accolyte ébéniste, j'interviens de nuit dans les vitrines des enseignes de luxe pour l'agencement, ce genre de décor technique, et des mises en place.
TSF
C'a dû changer votre quotidien, cette décision !
Hugues
C'est repartir à zéro. Ce n'était pas évident, mais j'avais un peu d'argent de côté et Virginie était là, ça fonctionne bien pour elle. C'est aussi une histoire de couple, d'équipe. Seul, je ne l'aurais pas fait. Et puis ça tombait sous le sens avec Sacha : c'est aussi l'idée d'avoir un autre rythme de vie. De ne plus travailler les soirs, les week-ends, les vacances comme dans la restauration.
TSF
Quelles sont les activités de l'agence LFM ?
Virginie
C'est une agence créative qui est spécialisée dans la nourriture et les boissons. On fait beaucoup d'événements, de dîners, de booking de chefs pour des marques. Et on accompagne aussi des restaurants et des chefs dans leur image, leur positionnement, leur stratégie de développement. Notre dernier volet c'est le conseil. On nous appelle pour obtenir des conseils : que doit-on servir à manger quand on est la marque X ou Y ? Quel est notre discours concernant l'évènement culinaire ? Pourquoi à ce moment-là ? L'air de rien, la gastronomie est un vecteur de communication majeur aujourd'hui. Un client, quand il va en boutique, tu lui sers un truc à boire et à manger. Qu'est-ce que tu lui sers ? Pourquoi tu lui as servi ça ? Et surtout, qu'est-ce que ça dit de ta marque ?
TSF
De nos jours, la gastronomie a pris beaucoup d'ampleur dans tous les domaines. N'est-ce pas devenu plus difficile de se démarquer dans ce domaine ?
Virginie
Je suis hyper contente que ça avance dans ce sens-là : on valorise des producteurs plus locaux, la gastronomie en général n'est plus négligée, réservée à certains seulement et prend de l'importance. Et je ne suis pas inquiète nous concernant : on est hyper créatifs à l'agence. On n'est pas dans la tendance mais dans le fond. Le point central de nos vies, c'est d'aller bouffer au resto ou dans un bar, tout le monde est passionné chez nous, tout le monde est bourré d'idées. On sait ce qui se passe dans notre domaine. On peut se déjouer des tendances, ou les utiliser parce que des clients veulent exactement la mode du moment et on la connaît par cœur : en ce moment, la petite coupelle en argent avec la glace, les gelées, dans deux ans ce sera autre chose mais nous, on sera toujours là parce qu'on analyse et on anticipe.
TSF
Et qu'est-ce qui arrive alors ?
Virginie
La superfood, ces aliments qui te font du bien : les collagènes, les charbons actifs, ça fait déjà un moment que ça existe, mais là, je pense qu'il n'y aura pas de soirée où l'on ne consommera pas un truc qui est censé nous faire du bien, dans une notion qui dépasse la simple gourmandise.
TSF
Dans quels environnements avez-vous grandi et comment ont-ils influencé vos goûts ?
Hugues
Je suis né à Rouen, où j'ai vécu jusqu'à mes treize ans avant de vivre à Valence où mon père a été muté, jusqu'à mes vingt-cinq ans. Mon père fabriquait les machines qui trient le courrier et ma mère était greffière. On passait nos étés en Bretagne, dans ma famille paternelle, qui était agricultrice. A la maison, c'était vraiment très classique, il n'y avait pas de souci du décor. C'est quand j'ai travaillé en restauration, que j'ai eu un mentor : c'est plutôt lui qui m'a fait découvrir l'ambiance, la décoration, la nourriture comme art de vivre. Cela étant dit, je me souviens qu'en Bretagne, avec mon père et mon frère, on retapait des maisons. On bricolait tout le temps.
Virginie
Je viens du 95, donc de la banlieue, d'une petite ville coincée entre des communes bourgeoises - Enghien-les-Bains et Montmorency - et de communes craignos comme Sarcelles. Ma mère travaillait dans le social. Elle gérait un IME, un institut médico-éducatif pour les enfants qui ont des handicaps plutôt légers. Elle m'a beaucoup emmenée sur ses lieux de travail. C'est pour ça que dans tout ce que je fais, le côté populaire et la mixité, c'est hyper important pour moi. Mon père travaille chez Renault. C'est un vrai transfuge de classe puisqu'il venait vraiment du ruisseau. Et il a réussi à voyager, à parler anglais, à frayer avec des mecs qui avaient fait de grandes écoles. Ca le rendait fier. J'ai donc grandi dans la fameuse classe moyenne française. Mon rêve, c'était Paris ! Paris, le bout de la ligne du train de banlieue. A part ça, ma mère avait du goût, m'emmenait voir des expos, est ouverte et curieuse.
TSF
Comment avez-vous découvert cet appartement et avez-vous réalisé beaucoup de travaux, ici ?
Virginie
A travers notre réseau de restaurateurs, bien sûr ! On a visité et on n'a rien eu à faire. Pour être très honnête, on a posé nos meubles, mais tout ce qui est là fait le charme de cet appartement : c'est-à-dire cette petite vigie avec terrasse. On est tombé amoureux de cette pièce, la cuisine, qui est baignée de lumière avec une grande terrasse. Ca correspond à notre mode de vie : faire à manger, inviter des amis. Notre cuisine est un peu notre salon. C'est l'endroit central de notre appartement.
Hugues
J'ai quelques projets de meubles à refaire pour la maison : l'enfilade en bas dans le salon, par exemple.
TSF
Pouvez-vous nous parler de quelques pièces que vous aimez en particulier, chez vous ?
Virginie
J'ai une passion pour le verre coloré. Couplée à une nouvelle activité : je fabrique des vitraux, vous en avez un exemple ici, dans la cuisine ! Et puis, on chine beaucoup. Nos chaises autour de la table sont signées Vico Magistretti, qui a contribué à "vulgariser" le design, ce qui forcément me plaît beaucoup. Après, Et comment ne pas citer l'art de la table. Je pourrais en acheter tout le temps !
Hugues
Tu en achètes tout le temps, d'ailleurs !
TSF
L'arrivée de Sacha dans vos vies a-t-elle changé votre manière de voir l'intérieur ?
Virginie
On a eu 15 jours l'espoir d'avoir une chambre d'amis. Sinon, rien n'a changé à part le rythme. On en parlait tout à l'heure : on a eu ce nouvel équilibre avec Hugues qui a changé de voie et mon activité qui a pris de l'importance au moment où j'accouchais ! Quand tu es entrepreneur, tu n'as pas de notion de congé maternité. Mais tu te fixes tes propres contraintes. C'est autre chose. Donc, je n'ai pas vécu un arrêt total pour profiter de mon enfant puis, sans transition, un retour au bureau. La transition a été plus douce, in fine ! Et j'avais surtout un mec en or, qui fait ce qu'il doit faire, c'est-à-dire la moitié des tâches. Puis, en reconversion, Hugues a pris pour lui beaucoup de mes tâches, il m'a permis de pouvoir continuer à travailler autant.
TSF
Quelles sont vos bonnes adresses du quartier ?
Virginie & Hugues
Dans notre quartier, il y a Tempilenti, notre restaurant préféré. Silvia et Francesca sont incroyables ! Le café du coin, encore un succès dont seul Florent Ciccoli a le secret ! Café Comets, le coffee shop où tu te sens trop bien. Ça me fait penser à l’atmosphère de Berlin. Les routiers Aux bons crus, bon, simple et bien positionné en prix. On y vient aussi pour Kévin le tenancier. Dans le Quartier du bureau, Buttes Snack Bar, c’est notre voisin (on partage la cour en face à face.) Ils sont supers et on mange-boit trop bien. Le Cadoret est indémodable et indétrônable, on ne se lasse jamais de cette cuisine et de cette ambiance. Paloma pour la meilleure formule déjeuner et super équipe. Les Folies pour s’assoir en terrasse la journée comme le soir et sentir les vibrations de Belleville.
TSF
Que pensez-vous de The Socialite Family ?
Virginie
The Socialite Family est un média captivant: pousser la porte de chez quelqu'un et découvrir son intérieur. Une passion en soi et surtout un bon moyen d’assouvir sa curiosité. C’est aussi une marque avec une signature forte, on reconnait le mobilier au premier coup d’oeil !
TSF
Avez-vous une pièce favorite dans notre collection ?
Virginie
J’aimais beaucoup la
mais j'admets que la
lui a volé la vedette.