Familles
L’appartement familial et chaleureux de Laure de Sagazan
Chez
Laure de Sagazan et Édouard de Fraguier, Joseph 7 ans, Marceau 6 ans et Pio, 3 ans
Vaste sujet que la robe de mariée, censée révéler la grâce et les atouts de son sujet. Pour sa couturière, cette symbolique absolue du grand jour requiert sans aucun doute un sens du féminin délicat et une empathie – voire une appréhension psychologique – particulièrement développée en plus d’une créativité évidente… Quelle femme ne frissonne pas en se souvenant de la longue attente pendant les nombreux essayages, des réflexions intenses sur la silhouette, de cette peur bleue de tacher la précieuse étoffe d’un pinceau de poudre ou d’un trait de mascara, du fantasme de ce premier regard posé sur le vêtement par l’autre, et par tous ? Difficile pour votre serviteur d’imaginer, avant de la rencontrer, que Laure de Sagazan, créatrice de robes de mariée, puisse être différente d’une Miranda Priestly à la féminité exacerbée ou d’une femme gracile tout droit sortie d’un roman de Jane Austen. Perdu ! Laure de Sagazan est joyeuse, le regard franc et clair, sans oublier ce petit je-ne-sais-quoi un poil garçon manqué qui vous séduit d’office. Elle nous ouvre ses portes au milieu des cris de guerre de ses trois garçons et de l’odeur du café que prépare Édouard de Fraguier, mari et tête pensante de leur marque. Nous les avons rencontrés chez eux, dans ce grand appartement lumineux qui fleure bon la joie de vivre et les préparatifs de Noël.
Lieu
Paris
texte
Elsa Cau
Photographies et Vidéos
Jeanne Perrotte
TSF
Laure, Edouard, qui êtes-vous ?
Laure
Vaste sujet ! J’ai 38 ans et j’ai choisi le monde de la mode, très féminin, alors que la vie a fait que j'ai souvent été entourée d'hommes : dès l'enfance, puisque je n'ai eu que des frères. À nouveau aujourd'hui, puisque je suis mariée et mère de trois garçons. J'ai pourtant fait le choix de briser le schéma, en travaillant pour les femmes et entourée de femmes. À l'atelier, pas de parité, on est à peu près 35 filles... j'ai une vie en deux salles, deux ambiances !
Edouard
Moi, c'est l'inverse. Je suis un homme entouré de femmes à l'atelier ! J’ai 40 ans, je suis amoureux des voyages, des grands espaces et des sports nautiques. J’aime l’idée de faire du beau dans notre atelier parisien, de valoriser le savoir-faire français à l’international, et le tout, en famille.
TSF
Quel est votre parcours à chacun ?
Laure
J'ai poursuivi des études de stylisme avant de travailler trois ans dans le prêt-à-porter à Paris pour Ba&sh et de, très vite, me rendre compte qu'il y avait peut-être des nouveautés à proposer dans le secteur de la robe de mariée. Édouard, le meilleur des acolytes, m'a poussée en ce sens. On s'est lancés il y a maintenant treize ans, en créant notre marque de robes de mariée tous les deux.
Edouard
De mon côté, j'ai fait des études d'économie à Paris. J'ai travaillé dans le conseil d'audit financier, puis dans le conseil en organisation dans un cabinet américain. Au bout de quelques années, on a décidé de monter Laure de Sagazan ensemble. J'ai gardé mon travail pendant deux ans avant de rejoindre à plein temps l'atelier. Cela fait maintenant un peu plus de dix ans.
TSF
Comment en êtes-vous venue à la robe de mariée, Laure ?
Laure
C'est marrant parce que je ne pensais avoir aucune prédisposition pour la robe de mariée. Ce n'était pas une pièce qui me faisait rêver. Quand on a vidé notre maison de famille, en fouillant au grenier, j'ai pourtant retrouvé mes premières collections de robes de mariée : dessinées à 10 ans !
TSF
Ce n'est pas difficile, d'être ensemble à la ville comme à la scène ?
Laure
Ça demande une organisation, c'est sûr ! Quand Édouard est arrivé, on fonctionnait au bic quatre couleurs et à l'agenda papier. Il nous a imposé des réunions, des agendas connectés (rires). Il a fallu qu'on harmonise nos violons. Le même mois, on a acheté notre premier appart, on s'est mariés et on s'est mis à travailler ensemble ! On a fait en sorte de garder notre indépendance tous les deux. On va bosser chacun de notre côté le matin. On ne s'attend pas pour y aller ou pour rentrer. Et puis, on travaille dans des domaines assez séparés, à l'atelier.
Édouard
Oui, on se laisse notre liberté de mouvement, d'action. On peut passer des journées entières sans se voir, et on a une règle d'or : ne parler boulot que la journée, jamais le soir ni le week-end.
TSF
Dans quel environnement avez-vous grandi et comment a-t-il influencé votre vision de l'intérieur ?
Laure
J'ai grandi à Lille avec une famille qui paraît assez traditionnelle sur le papier. Mais j'avais un père plutôt loufoque. C'était donc folklorique, comme ambiance, comme jeunesse ! Mon père nous avait eus très tard et n'aimait pas vivre dans les clous. Issue d'un moule un peu classique, j'ai finalement eu une enfance assez rock'n'roll ! Mes parents chinaient beaucoup et nous emmenaient aux puces, dans les brocantes. Ils accumulaient beaucoup. Plus tard, j'ai plutôt pris le contre-pied avec l'envie d'épurer. En revanche, ça m'a donné un goût pour les objets qui ont vécu, qui sont patinés, imparfaits. Je déteste le trop lisse, que ce soit chez les gens ou dans la décoration !
Edouard
Je suis né à Paris. J'ai grandi près de Grenoble, au pied des montagnes. Avec beaucoup de sport et de grands espaces. Puis, j'ai vécu mes années de collège à Versailles avant de revenir à Paris. Mes grands-parents maternels ont construit une maison en Bretagne avec un architecte, Roger Le Flanchec, un adepte de Le Corbusier. La maison que j'adore est très atypique, construite dans une carrière, avec beaucoup de jeux de lumière grâce à des baies vitrées, des puits de lumière, du bois, on a vraiment l'impression d'être dans la nature et on y a d'ailleurs organisé un shooting pour l'une de nos collections en 2015.
Dans le salon familial, notre
voisine avec les pièces de designer et les objets chinés.
Posée sur le buffet, notre
s'adapte à toutes les saisons et tous les intérieurs !
TSF
Qu'avez-vous voulu créer comme ambiance dans cet appartement ?
Laure
D'abord, on avait très envie de choisir le bon endroit. En moins de dix ans, on a déménagé 4 ou 5 fois. Là, l'objectif était d'être dans un lieu central, proche de tout : le travail, la crèche, l'école, les commerces... C'est ce qu'on a trouvé. On a eu du mal à quitter un appartement très atypique, avec du cachet, mais il nous fallait plus grand. Un critère essentiel, c'était d'être au premier étage pour ne pas limiter nos trois garçons dans le bruit ! Et ils sont bruyants, je vous le garantis (rires). C'était donc l'appartement raisonnable, pas forcément coup de cœur mais dans lequel on va rester quelques années avant le prochain...
Edouard
On verra ça ! En fait, on s'ennuie dès que c'est à peu près fini, on est déjà en train de regarder autre chose... Tout en s'imposant des contraintes au fur et à mesure du temps. Avec trois enfants à déménager, c'est une autre logistique que par le passé. Sans compter le besoin de s'ancrer dans un quartier.
TSF
Avoir des enfants, cela a changé votre vision de l'intérieur ?
Laure
Ça pousse à lâcher prise et à accepter le foutoir. On n'aurait sans doute pas fait le même shooting il y a cinq ans. Maintenant, c'est plus spontané, plus imparfait. Le canapé Rotondo est mis à l'épreuve par les enfants qui sont en funambule ou se vautrent toute la journée, et il tient super bien !
TSF
En tout cas, trois garçons, ç'a dû changer votre rythme quotidien !
Laure
En ce moment, tout nous paraît plus simple parce que notre petit dernier a 3 ans. Jusqu'à maintenant, on avait enchaîné notamment avec nos aînés qui n'ont que dix-huit mois d'écart.
Edouard
Et puis on a cette chance de travailler ensemble, d'avoir une certaine flexibilité aussi dans la manière dont on organise nos journées. On s'est volontairement simplifié toute la logistique.
Laure
Mais ça implique d'accepter l'imperfection, il y a des couacs, tout n'est pas rodé comme on le voudrait. Enfin, je pense qu'on aime ce foutoir, ce tourbillon qui est autour de nous. On ne changerait pas grand-chose.
TSF
Pouvez-vous nous parler de quelques objets que vous aimez en particulier ici ?
Laure
J'ai acheté cette grande lampe posée au sol dans le salon il y a quinze ans, pour 20 euros sur Leboncoin ! J'ai supplié ma mère d'aller la récupérer pour moi puisqu'elle était au fin fond du Nord-Pas-de-Calais. Depuis quinze ans, c'est le premier objet que je place dans chaque appartement.
TSF
Il y a une petite influence d'Extrême-Orient aussi, ici.
Laure
C'est très poétique, les meubles japonisants et « chinoisants ». Et je trouve qu'il y a une atmosphère très douce et vivante qui en émane.
Edouard
J'adore mes fauteuils Wassily que je suis allé chercher à Bruxelles. Mais c'est vrai que l'ambiance générale, c'est plutôt Laure qui donne tout le ton.
Laure
Les garçons aussi participent ! Marceau pour son papier peint, Joseph pour la peinture de sa chambre... Bon, après, c'est sûr que si on les écoutait, il n'y aurait que des posters de Tortues Ninja...
Dans sa chambre, l'installation éphémère de Pio, réalisée pour les photographies...
TSF
Quelles sont vos actualités ?
Laure
On a ouvert un showroom en propre à Bruxelles l'année dernière et on a tout juste dupliqué le modèle à Barcelone le mois dernier ! On continue de s'étendre, puisque celui-ci s'ajoute à notre vingtaine de points de vente, essentiellement composée de revendeurs. On développe aussi notre ligne enfant, Détours par Laure de Sagazan, depuis quelques années. C'est un terrain de jeu merveilleux que créer de petites pièces pour enfants au charme rétro, pour les moments qui comptent.
TSF
Que pensez-vous de The Socialite Family ?
Laure
C'est un média que j'adore. La porte d'entrée vers des territoires inconnus, des mondes parfois nouveaux, ou parfois plus familiers. C'est un terrain de jeu passionnant, une petite exploration à chaque fois.
TSF
Avez-vous une ou plusieurs pièces préférées de notre collection ?
Laure & Edouard
On adore évidemment le
qu'on a en léopard dans le salon depuis quelques années. Je ne m'en lasse pas, et moi qui ai grandi dans les Togo, entourée de mes frères, je retrouve ces moments de famille apparemment insignifiants, et pourtant magiques. J'ai aussi découvert récemment les bougeoirs
que j'aime beaucoup.
TSF
Quelles sont vos bonnes adresses du quartier ?
Laure & Edouard
La friperie Love & Dress (51 rue Condorcet, Paris IXe), pour sa sélection géniale. Mamiche (49 rue Condorcet, Paris IXe) pour le pic de glycémie réconfortant. Les Balades Sonores (3 avenue Trudaine, Paris IXe) pour Thomas et Esther qui incarnent ce lieu, et leurs goûts parfaits. L'objet qui parle (86 rue des Martyrs, Paris IXe) pour ses objets loufoques, qui ont toujours une âme. La librairie L'Atelier 9 (59 rue des Martyrs) qu'on écume avec nos garçons... leurs conseils sont toujours très bons.
Notre
parfait pour les longues soirées d'hiver et ici utilisé en couvre-lit dans la chambre parentale.