Familles
Cabinet d'influences dans le quartier de la Nouvelle-Athènes
Chez
Alessandro Moriconi et Antoni Calmon
Secrètement préservée du tumulte de la place Pigalle, la maison d’Alessandro Moriconi et Antoni Calmon invite au dépaysement le plus total. Comme un voyage dans le temps, elle nous transporte dans le Paris de la Belle Époque et se dévoile demeure de campagne avec jardin. Un joyau architectural niché dans une impasse confidentielle ayant vu défiler des pontes de l’âge d’or des Années folles aux personnalités contemporaines les plus exubérantes. N’échappant pas à la règle du romantisme ambiant, la construction de style Directoire du consultant créatif et du médecin esthétique est le giron bienveillant d’un mélange culturel franco-italien. Un art de vivre né de la rencontre entre les deux esthètes. Deux univers riches qui s’accordent et se nourrissent mutuellement, de la décoration de leur résidence… aux collaborations professionnelles. Appartement élégant et espiègle, le cabinet d’esthétique d’Antoni – réalisé par son compagnon Alessandro – en est la preuve la plus vibrante ! Deux âmes inspirées qui cultivent également de nombreuses passions. L’opéra, l’histoire ou l’équitation pour le Catalan. Des goûts « très modernes » ironise-t-il, qui prennent tout leur sens une fois chez eux. Un piano à queue, des beaux livres d’art, des tableaux et sculptures ponctuent cette maison, devenue recueil de toutes leurs préoccupations artistiques. Un cabinet de curiosités qu’ils rêvent et aménagent avec fantaisie à l’instar de leur « chambre bleue ». Une alcôve romantique, véritable invitation à la rêverie. Respectant l’âme du lieu, le couple mélange ainsi des styles intemporels, d’époques et de cultures différentes. Des références portées notamment par la mémoire visuelle d’Alessandro. Se rencontrent ainsi une commode Régence, une tapisserie de Jean Lurçat, une natte mauritanienne ou encore une grande table Fratino. Un équilibre « charmant et confortable » où, galvanisé par sa dévorante curiosité, le directeur artistique nous entraîne dans son cabinet d’influences. Tout un art.
Retrouvez l’univers singulier d’Alessandro Moriconi et Antoni Calmon dans notre livre auto-édité The Socialite Family, Retrospective. Un florilège des plus beaux intérieurs aperçus au fil de l’histoire de notre média à se procurer en boutique comme sur notre e-shop.
Lieu
Paris
texte
Caroline Balvay
Photographies et Vidéos
Constance Gennari
TSF
Alessandro, Antoni : pouvez-vous vous présenter ?
Alessandro
Je suis un Italien de Toscane expatrié à Paris depuis plus de dix ans, consultant créatif dans la mode et dans la décoration notamment pour l’agence d’architectes Humbert & Poyet. Mon métier consiste, en fonction des projets et des souhaits de mes clients, à donner des directions et des inspirations artistiques pour créer des lieux ou des expériences uniques qui leur ressemblent.
Antoni
Je suis Antoni Calmon, médecin esthétique entre Paris et Londres. Mon quotidien se résume à faire en sorte que les gens soient bien dans leurs baskets. Natif de Perpignan, je suis à Paris depuis six ans et voue une passion à l’Histoire, l’opéra et l’équitation. Moderne, n’est-ce pas ? (Rires)
TSF
Quelle est la particularité de cette maison ?
Alessandro
Nous sommes dans cette maison depuis six ans, en plein cœur de l’effervescente place Pigalle mais au calme d’une impasse privée. Les maisons Directoire de cette avenue ont connu des locataires illustres comme Django Reinhardt, Régine Crespin ou plus récemment Jean-Paul Gaultier. Il y fait bon vivre dans une atmosphère très campagne.
Antoni
La nôtre est très agréable. Elle est traversante avec six grandes fenêtres donnant plein ouest sur le jardin, et trois autres avec vue sur le jardin des voisins à l’arrière. Cette habitation est conçue comme une demeure de campagne avec une décoration où la nature s’invite doucement. L’appartement se distribue au rez-de-chaussée par la petite chambre bleue en alcôve. L’autre coin nuit est orné d’une tapisserie Bélier de Jean Lurçat. Un clin d’œil au lycée du même nom situé Perpignan et où j’ai effectué ma scolarité. Nous avons également une bibliothèque, où se trouve un piano à queue pour les soirées chantantes, et une cheminée. La salle à manger, le salon et la cuisine se trouvent dans un seul grand espace. Cette dernière disparaît dans le décor, recouverte de laiton qui reflète le parquet. Nous avons également une grande table Fratino semblable à celle des couvents italiens qui peut accueillir 12 invités hors Covid. Tout le sous-sol est aménagé comme une suite indépendante pour les amis ou la famille de passage.
TSF
Pouvez-vous nous expliquer votre style à chacun et la manière dont vos goûts respectifs se rencontrent ici ?
Alessandro & Antoni
Le style dépend énormément du lieu. Cette maison est empreinte d’histoire dans ce quartier de la nouvelle Athènes, il était très important pour nous d’en respecter l’âme. Pour un appartement parisien, le plus intéressant est le mélange des styles et des époques mais également le mélange culturel franco-italien. Ainsi cohabitent une commode Régence estampillée avec des sièges Barcelona customisés en tissu, une console d’inspiration Carlo Scarpa avec une tapisserie de Jean Lurçat, ou encore des œuvres du sculpteur Gérard Lanvin avec une natte mauritanienne.
Le style dépend énormément du lieu. Cette maison est empreinte d’histoire dans ce quartier de la nouvelle Athènes, il était très important pour nous d’en respecter l’âme.
TSF
Alessandro, comment trouve-t-on le bon équilibre dans un espace ?
Alessandro
Le bon équilibre, c’est très difficile à appréhender, on se trompe souvent ! Il ne faut pas hésiter à douter, essayer, changer. Faire, refaire et défaire, c’est finalement bien faire (rires) ! Quand je rentre dans un espace, je pense tout de suite à me transposer, à me mettre à la place de la personne qui sera là. J’imagine ce qu’elle verrait, quelle ambiance elle ressentirait.
TSF
Où passez-vous le plus de temps chez vous ?
Alessandro & Antoni
Dans la petite chambre bleue où nous bouquinons, logés dans l’alcôve comme dans un lit d’enfant avec une petite bibliothèque éclairée par deux appliques Sirène dans le style de Georges Jouve.
TSF
Avez-vous une époque de prédilection ? Un designer que vous aimez passionnément ?
Antoni
J’aime les créations classiques de la période Biedermeier, dont les lignes sont dépouillées et simplifiées.
Alessandro
J’ai une passion pour Diego Giacometti dont le mobilier en bronze est dingue, à la fois brut et sophistiqué !
TSF
Quels sont vos critères lorsque vous recherchez une pièce ?
Alessandro
Le côté unique et l’authenticité. C’est-à-dire que la pièce doit donner l’impression d’avoir toujours été là.
Antoni
En ce moment, nous sommes obsédés par le mobilier Henry II avec les pieds spiralés, des lignes simples, pleines mais historiques. Un tabouret, un bureau, un banc : ce que vous voulez, pourvu qu’il y ait de la spirale !
TSF
Actuellement, aimez-vous travailler une matière en particulier ?
Alessandro
Le travertin pour son aspect humble mais massif et noble, sa couleur et ses nervures presque comme de la peau, mais aussi sa connotation historique séculaire. Beaucoup de monuments de Rome sont en travertin.
TSF
Comment définiriez-vous votre style en trois mots ?
Alessandro
Mélangé, charmant et confortable.
TSF
Quel sera votre rêve décoratif le plus fou ?
Alessandro
Rénover une abbaye ou un phare. La création f__rom scratches_,_ ce n’est pas très inspirant pour nous. Un lieu, une âme, une atmosphère : ça, ça nous parle. Nous nous imprégnons, digérons, comprenons, réfléchissons, puis nous proposons.
TSF
Et la pièce de mobilier que vous aimeriez acquérir par-dessous tout ?
Alessandro
Je rêve d’une table Brazier en bronze de Rick Owens et de la lampe Gabriella Crespi.
Antoni
Et moi d’une table brazier en bronze de Rick Owens. Des lignes simples presque préhistoriques. Une matière sobre et massive.
TSF
Le restaurant où vous irez dès que possible à sa réouverture ?
Antoni & Alessandro
Cibus, le petit resto italien le plus exigu de la capitale ! Pour être le plus possible collés les uns aux autres, et être sûrs de bien manger.
TSF
Où vous retrouverons-nous dans les prochains mois ?
Alessandro
En Sicile pour un projet privé d’une personne que j’aime beaucoup et avec qui tout est simple. Un client qui devient finalement un collaborateur. Le rêve !
Le bon équilibre, c’est très difficile à appréhender, on se trompe souvent ! Il ne faut pas hésiter à douter, essayer, changer. Faire, refaire et défaire, c’est finalement bien faire !