Une fois notre projet de maison mûrement réfléchi, nous avons commencé à rencontrer plusieurs architectes belges avant de tomber totalement par hasard sur un épisode diffusé sur la BBC de The World’s Most Amazing Houses portant sur la construction d’une maison enterrée dans la banlieue d’Amsterdam « The Dutch Mountain ». Une révélation. Pour profiter de grands volumes sans en avoir l’air, enterrer la maison serait une solution. Ni une ni deux, nous contactons dès le lendemain, avec Marine, ces architectes hollandais et nous voilà, quelques jours après, dans la capitale néerlandaise. Le courant passe très bien avec ce jeune duo d’architectes. Nous nous serrons la main et l’aventure commence enfin ! Le projet prend forme autour de trois contraintes : un programme (agencement des pièces) compatible avec notre mode de vie, une vision d’un volume enterré pour réduire son empreinte visuelle et une habitation pensée pour le monde de demain. Ce sera finalement le travail sur nos modes de vie qui sculptera la forme générale du projet. La structure se constitue petit à petit de trois blocs, un premier bloc pour les chambres (appelé la sleeping tower), un bloc central constitué de la cuisine et des pièces de vie sur une double hauteur (living tower) et un troisième bloc qui comprend l’espace de travail (working tower). Ces blocs sont des cubes de bois qui paraissent depuis la rue comme complètement dissociés les uns des autres alors qu’ils sont en réalité posés sur une structure en béton enterrée qui permet la circulation d’un espace à un autre. La partie souterraine est ouverte vers l’extérieur au sud pour faire entrer la lumière à travers d’immenses baies vitrées d’où part le jardin qui relie gracieusement, en pente douce, le demi-sous-sol et le rez-de-chaussée. Un grand garage totalement enterré permet le retrait des blocs depuis la rue et offre un open space pour une voiture, les vélos, la cave à vin, l’atelier, des rangements et la table de ping-pong. Une immense porte secrète à deux battants permet d’ouvrir le garage vers la pièce de vie principale pour connecter les deux espaces.

Lors de sa conception, nous avons eu l’envie d’imaginer la maison du futur. Nous avons pensé l’architecture générale et les techniques de manière à réduire au minimum l’empreinte environnementale de la structure malgré sa taille. Le bâtiment est totalement passif, la partie enterrée permet une isolation naturelle de ce gros volume. Nous avons choisi des toits plats sur toute la maison pour pouvoir y installer des panneaux solaires et récupérer les eaux de pluie. Celles-ci sont drainées vers des puits qui alimentent un circuit d’eau dédié aux toilettes et à l’arrosage. Pour le chauffage, nous avons opté pour un système de pompe à chaleur eau-eau avec géothermie grâce à trois puits de 100 m de profondeur. Le chauffage est complété par un insert à bois logé dans la pièce centrale (alimenté avec le bois du jardin coupé pour la construction) et un système de ventilation qui répartit de manière homogène la chaleur dans la maison. Nous avons décidé de ne pas connecter la maison du tout au gaz de ville. Au-delà des techniques à proprement parler, nous avons défini les espaces de vie avec l’agence KRFT en fonction des heures de la journée. Inspirée du Japon, cette réflexion permet d’associer aux techniques une démarche écologique passive (NDRL : Le concept du bâtiment passif est que la chaleur dégagée à l’intérieur de la construction (êtres vivants, appareils électriques) et celle apportée par l’extérieur (ensoleillement) suffisent à répondre aux besoins de chauffage.) Les espaces de vie sont donc pensés en fonction de la position du soleil et des saisons et ils sont même délimités au sol par des différences de niveau et de matière. Le garage, l’arrière-cuisine, la salle de jeu et le salon télé sont ainsi en béton lissé en contrebas par rapport au jardin alors que, sur le même plan, la cuisine et le salon sont en parquet surélevé de 40 cm affleurant la terrasse et le jardin.

J’ai grandi de mon côté dans un petit village des Alpilles au sud de la France. Marine a, quant à elle, côtoyé les grandes mégalopoles américaines comme Houston, Dallas ou Boston. Après notre rencontre, Bruxelles s’avérait être un bon compromis pour s’y installer en offrant les avantages d’une capitale européenne et la qualité de vie d’une ville de province. C’est cette promiscuité avec cette immense hêtraie qui nous retient aujourd’hui à Bruxelles et qui a motivé le choix de l’emplacement de la maison. Toute la maison est d’ailleurs tournée vers la forêt, depuis la cuisine et, à travers le jardin, le regard se perd dans la verdure. Il n’y a aucun obstacle visuel entre la maison et le début de cet immense espace boisé. Cette forêt est en même temps un havre de paix. Nous nous offrons souvent des promenades dans les bois et même, parfois, en marche nordique. C’est un incroyable terrain de jeu ! Nous répétons souvent à nos enfants la chance qu’ils ont de vivre sous un climat tempéré, avec des saisons bien marquées. La forêt est le reflet des quatre saisons, luxuriante voire tropicale en été, elle brunit en automne en offrant des couleurs dignes du Vermont. En hiver, elle se dénude totalement pour offrir des perspectives nouvelles et des troncs à perte de vue. Le printemps est la saison préférée de Marine, quand les petites feuilles vertes commencent à pointer le bout de leur nez sur toutes les branches et que la nature sort de sa torpeur. Ces saisons, et les activités qui vont avec, rythment notre vie de famille et nous font vibrer au diapason de la nature.