Familles
Perchée sur les hauteurs de Nice, une maison de famille remplie d’art et de souvenirs
Chez
Lucillia Chenel et sa mère Chantal
À Paris, le nom n’est pas inconnu des amateurs. La galerie Chenel est spécialisée depuis 1999 dans la sculpture antique et se distingue par des expositions mêlant jeunes ou grands noms d'autres disciplines (l’artiste Victor Cadène, le photographe François Halard ou encore le mobilier de la Maison Pierre Augustin Rose, pour n’en citer que quelques-uns) avec grands classiques de l’Antiquité. Pour autant, ce n’est pas ici, sur les quais de Seine, que tout a commencé… Quelques décennies plus tôt, les Chenel n’en faisaient déjà qu’à leur tête à Nice, le fief familial. Changement de décor : il suffit de passer le grand portail qui mène aux jardins et à la villa de la famille Chenel pour perdre toute notion du temps. Au loin, la Méditerranée scintille du premier soleil timidement estival. Ne manque qu’un air d’Henry Mancini ou d’Ennio Morricone… Dans cette belle maison bourgeoise du XIXe siècle, c’est toute l’histoire d’une famille qui se déroule. Et dans cette tribu – qui s’est encore rapprochée et resserrée autour de la figure maternelle après la disparition de son patriarche Alain Chenel –, c’est aux femmes que s’intéresse The Socialite Family : Chantal et sa fille Lucillia Chenel partagent beaucoup, à commencer par Nice. Nous les avons rencontrées chez Chantal, dans la maison perchée sur son promontoire et jamais vide, remplie d’art et de souvenirs… quand ce n’est pas d’enfants et de petits-enfants.
Lieu
Nice
texte
Elsa Cau
Photographies et Vidéos
Valerio Geraci, Carine Bouhier
"Le jardin, la terrasse ? Tout à refaire à notre arrivée !" s'exclame Chantal Chenel.
TSF
Chantal, Lucillia, qui êtes-vous ?
Chantal
Je suis la maman des galeristes Ollivier et Adrien Chenel et de Lucillia, directrice artistique. Je suis femme d’antiquaire. Je suis artiste, touche-à-tout et récemment, je suis devenue créatrice de bijoux que je réalise sur commande, via Instagram. Je suis Varoise et Niçoise !
Lucillia
Moi aussi, je suis Niçoise, mais j'ai passé neuf ans à Paris et je suis revenue vivre ici il y a trois ans. J'adore la vie ici. J'ai cofondé une société d'événementiel en 2019, centrée autour de la notion d'astrologie. Je suis directrice artistique et en parallèle, je crée encore un peu de contenu sur les réseaux.
Chantal
Cela fait quarante-neuf ans que je suis Niçoise. La seule autre Niçoise de la famille, c'est Lucillia et elle le revendique depuis qu'elle est toute petite ! Ollivier et Adrien, mes deux fils, sont nés dans le Var, à Saint-Raphaël, dans la clinique ou j’ai moi-même vu le jour – j'étais d'ailleurs le premier bébé a y être inscrite !
TSF
Comment êtes-vous arrivée à Nice, Chantal ?
Chantal
J'avais 20 ans quand j'ai décidé de vivre avec mon mari, je l'ai rejoint à Nice où il exerçait déjà comme antiquaire depuis plusieurs années. Mais nous nous sommes rencontrés à Saint-Raphaël.
Lucillia
Chez un antiquaire...
Chantal
Chez un antiquaire, oui, qui était un ami commun de mes parents et d'Alain Chenel ! J'avais 18 ans. Une amie m'avait traînée chez François Biancarelli pour voir ses nouveaux arrivages et moi, je n'en avais rien à faire (rires). Bon, après, je m'y suis beaucoup intéressée. Lui, Alain, est arrivé de Corse où il était parti chiner, avec son grand break chargé de meubles. Depuis... François est le parrain de Lucillia.
TSF
Votre parcours est intimement lié à celui d'Alain Chenel, votre mari.
Chantal
Quand j'ai rencontré Alain, j'étais censée partir comme jeune fille au pair avec ma cousine. Mais j'ai tout de suite senti qu'il y avait quelque chose de fort entre nous. Je lui ai dit : « Pars, toi. Moi, je reste. » Je sentais que j'allais rater le coche, sinon. Il avait 26 ans. Il était très prudent : à l'époque, j'étais mineure... mais ça m'est tombé dessus, comme ça. On a commencé à se fréquenter très peu de temps après, à ma majorité – que Giscard avait tout à coup fixée à 18 ans (rires). Enfin, bon, je ne parle pas l'anglais à cause de mon mari. Il était déjà installé. Il a commencé au Village Ségurane (quartier des antiquaires à Nice, ndlr) avec, justement, François (Biancarelli, ndlr), les Frémontier, toute la bande qui est ensuite partie pour Paris. Il n'y a que moi qui ai fait de la résistance ! Et même s’il m'a cassé les pieds pendant des années, je n'ai jamais voulu aller à Paris, contrairement aux enfants ! Ici, nous avions une qualité de vie fabuleuse... ce n'est pas pour rien que tout le monde revient, d'ailleurs. À l'époque, il m'en a un peu voulu. Puis il a fini par admettre que j'avais raison !
Un grand vase de la céramiste Léa Ginac trône sous le porche d'entrée.
Notre drap de plage
prend ses aises près de la piscine.
Une sculpture de l'artiste Janine Jannet (1913-2000) anime l'entrée de la maison et ravive les souvenirs de Chantal Chenel (interview ci-dessous).
Quand je suis rentrée à Nice, je me suis rendu compte qu'il y avait beaucoup de créatifs qui ne se connaissaient pas. J'essaie d'aller chercher les talents de la région et de les faire se rencontrer pour les mêler dans des projets.
Ton sur ton dans la cuisine, notre
Le dernier projet en date de Lucillia Chenel : la direction artistique et l'identité d'une brasserie niçoise qui ouvrait ses portes ce mois-ci, Les Mimosas.
TSF
Quand avez-vous ouvert la première galerie Chenel ?
Chantal
Moi, je suis arrivée à 20 ans sans rien comprendre au métier, je n’ai fait que suivre mon mari aux puces, j'attendais comme ça, des heures, dans la boutique... alors je m'étais mise à tricoter. Tout le quartier tricotait, d'ailleurs, toutes les nanas s'ennuyaient (rires). J'avais lancé le tricot ! J'ai su qu'à Paris, on fonctionnait en trois jours d'ouverture. On l'a fait : c'était génial, après, on a eu une vie extraordinaire parce qu'on était tout le temps sur les routes. D'où l'intérêt d'avoir un œil jeune et frais dans ce métier ! Et puis, dans ces années-là, on avait besoin de peu d'argent pour remplir des breaks de marchandises... Ce n'était pas les prix d'aujourd'hui ! Jusqu’en 1984, on était sans boutique, on passait notre vie à chiner en Italie ! En 1984, on a ouvert La promenade des antiquaires, une galerie qui n'existe plus. À l'époque, à Nice, avait été créé un système qui ressemblait au Louvre des Antiquaires à Paris. Puis des petites crises se sont enchaînées, les affaires allaient moins bien. C'est pour cela qu'on avait arrêté de travailler en boutique, en 1992. On en avait un peu assez. Alain et Romain Ginac se sont associés. Ensuite, je me suis principalement occupée de nos mises en scène et de nos décors pour les salons. Mon mari m'a beaucoup poussée parce que j'étais toujours en train de dessiner. D'ailleurs, c’est de famille : mon arrière-grand-père était peintre. Je me suis beaucoup amusée : on est par exemple partis à Hong Kong avec les Ginac et toutes nos céramiques. À l’époque, les céramiques de Picasso n’étaient pas très connues. Alain et Romain en ont beaucoup acquis pour les revendre. Romain avait trouvé en Alain un frère spirituel, même un père. Pourtant, ils n'avaient pas une très grande différence d'âge. Toujours est-il qu'on a vécu très proches, les enfants ont grandi ensemble, on vivait sur le même palier.
TSF
Quand vous êtes-vous mariés ?
Chantal
Nous, on ne voulait même pas se marier, mais comme j'étais enceinte... J'avais 21 ans, l'année suivante, j'ai eu mon premier fils, Ollivier. Ce qui explique que j'ai été une grand-mère très jeune (rires). D'ailleurs, quand j'ai appris que j'étais enceinte, j'étais contente, mais un peu triste, je l'admets, parce qu'on vivait sur les routes et que ça allait s'arrêter !
TSF
Aviez-vous une spécialité ?
Chantal
On ne s’est jamais trop enfermés, mais à cette époque-là, Alain était plus dans l'art nouveau, période dans laquelle il était expert pour les ventes aux enchères, et l'art déco, pour lequel j'ai beaucoup insisté quand je me suis découvert une passion pour ce style. Mais moi, je ne connaissais rien, c'était très spontané... il m'a tout appris.
TSF
Les Chenel étaient-ils déjà intéressés par l'Antiquité, ou est-ce une idée d'Ollivier, votre fils ?
Chantal
Pas spécialement, parce que mon mari brassait de tout. Certes, il achetait déjà des antiquités romaines mais parmi d'autres choses, d'autres époques ! Quand j'y pense, nos enfants ont plutôt adopté le goût des Ginac.
TSF
Quand les garçons ont grandi, ils ont commencé à travailler avec vous.
Chantal
Ollivier, l'aîné, dès l'âge de 7 ans, voulait être antiquaire. Adrien, lui, ne savait pas trop, mais c'était aussi une possibilité dans son esprit. Mais enfin, lui, il est tellement artiste. C'est celui qui ressemble le plus à sa mère (rires). Ollivier et toi, Lucillia, vous parlez peu, vous êtes plus taiseux, comme votre père...
Lucillia
J'ai un gros caractère.
Chantal
Oui. Très... Très grincheux et hypersensible ! Mais très famille, comme ton père. Alain, c'était sa famille avant tout. Il avait été abandonné. Nous, et son métier, étions les grandes passions de sa vie. La veille de son décès, il était encore à donner des ordres d’achat pour la salle des ventes. C'est comme être acteur de théâtre : c'est un métier à vie. Toujours est-il qu’en 1999, les choses ont évolué : Ollivier avait 22 ans et avec sa femme Gladys, ils se sont installés à Paris et on leur a ouvert la boutique rue du Bac. Moi, je venais uniquement pour faire les décors, quand il fallait faire de petites mises en scène à la galerie. Pendant ce temps, Alain, Lucillia et moi sommes partis en Angleterre où nous sommes restés deux ans. On chinait bien, en Angleterre. On a inscrit Lucillia au lycée français et je suis repartie sur les routes avec mon mari...
TSF
Et après ces deux années en Angleterre, vous êtes rentrés à Nice ?
Chantal
Oui. Et mon mari a continué à travailler avec Ollivier avant de passer le flambeau.
La salle de bains et son mobilier sur mesure auront pris plus de six mois à être réalisée.
Au mur, une céramique de Vallauris suspendue au-dessus d'un serviteur muet de Jacques Adnet;
TSF
Et vous, Lucillia, dans tout ça ?
Lucillia
Moi, j'ai hérité de la passion pour la décoration que ma mère m'a transmise.
Chantal
Elle était toujours derrière moi (rires).
Lucillia
Ma mère avait l'habitude de changer la déco de ma chambre tous les ans, à chaque rentrée des classes. On partage cette passion du décor et des thématiques. D'ailleurs, je commence toujours un décor par un thème. Ça vient forcément de mon enfance (rires) : je me souviens d'un jour où j'ai découvert ma chambre redécorée par ma mère sur la thématique du jardin. C’était fou.
Chantal
J'avais passé des heures à lui faire des nœuds avec des bouquets de fleurs accrochés aux murs...
TSF
Dans quel univers avez-vous grandi, comment a-t-il influencé votre goût ?
Lucillia
Je dirais... un univers vraiment changeant.
Chantal
Je l'ai déstabilisée par tous mes décors (rires).
Lucillia
Maintenant, je suis obligée de refaire ma déco ou de déménager fréquemment parce que je ne supporte pas d'être dans un même environnement longtemps. J'ai besoin de changer tout le temps.
Chantal
Je faisais ça à la maison aussi. Quand on travaillait un peu en appartement, notamment.
Lucillia
Par contre, enfant, je n'avais pas cette même passion pour les objets anciens. Au contraire, je n'aimais pas me dire qu'une pièce avait appartenu à quelqu'un. D'ailleurs, je ne m'asseyais même pas sur nos canapés ! Je ressentais presque une sorte de dégoût. Toutes mes amies vivaient au milieu d'objets neufs, ça me faisait rêver... le côté ancien, poussiéreux même, ne me plaisait pas du tout. Tout l'inverse d'aujourd'hui : j'aime chiner et nous chinons beaucoup ensemble, avec ma mère. Tous les lundis, en fait !
TSF
Il me semble que vous avez aussi un intérêt réel pour l'artisanat et l'art contemporain.
Lucillia
Je suis très souvent en lien avec des architectes, des artistes et des artisans d'aujourd'hui, surtout dans la région. J'aime réunir les talents, comme je l'ai fait pour la brasserie Les Mimosas à Nice, qui va ouvrir bientôt. J'aime aussi mélanger le contemporain avec l'ancien, c'est vrai, et c'est ce qu'on partage d'ailleurs avec ma mère : on aime bien récupérer l'âme des lieux...
Chantal
Faire revivre un lieu, même, essayer de se rapprocher le plus possible de ce qu'il aurait pu être à telle époque. Avec tout de même une interprétation actuelle.
TSF
Vous n’avez jamais voulu participer à la galerie familiale, Lucillia ?
Lucillia
J'ai essayé de m'éloigner de tout ça, donc j'ai eu plusieurs parcours. J'ai eu une galerie pendant une courte période, plutôt centrée sur le design des années 1970 et 1980, mais cela n'a pas duré. Est-ce que j'ai essayé de faire plaisir à mon père, de faire l'antiquaire ? Peut-être. Mais, in fine, mon truc à moi, c'est plutôt la scénographie et les décors, le choix des objets aussi. La vente n'a jamais été mon fort ! Je suis restée à Nice jusqu'à mes 22 ans. Après, je suis partie un peu aux États-Unis, où je travaillais dans la mode. J'ai fait des études de psychologie et en cela, je me différencie sans doute du reste de la famille (rires).
Chantal
C'est vrai que Lucillia a toujours voulu faire des études.
Lucillia
La psychologie et la philosophie sont toujours des sujets qui me passionnent. Beaucoup plus que l'art ! Puis, je suis arrivée à Paris, mais sans le vouloir : c'est parce que je n'avais pas de visa pour rester aux États-Unis. À Paris, le milieu de la mode ne me convenait pas du tout. À l'origine, je voulais faire du stylisme. Mais je me suis vite rendu compte que ce n'était pas pour moi. J'ai essayé beaucoup de choses, j'ai toujours ce problème d’avoir envie tout le temps de changer. C'est mon côté scorpion, de vouloir toujours renaître. C'est là que j'ai cofondé une galerie, puis arrêté pour cofonder ESO. Là, j'ai eu l'impression de trouver ma voie.
TSF
Vous êtes de quel signe, d'ailleurs ?
Chantal
Taureau
Lucillia
Nous sommes très complémentaires. Taureau, scorpion, ça marche bien ! C'est amusant parce que je me suis aperçue que dans notre thème astral à chacun, chaque membre de la famille, Vénus est dominante. La planète Vénus, pour résumer, motive souvent des métiers de création, de décoration, la recherche du beau... Nous sommes par exemple tous très sensibles à certains détails : mes frères à la lumière, ma mère et moi à un environnement rassurant fait d'objets que l'on aime... C'est amusant que nous ayons tous dans la famille ce dénominateur commun. C'est presque une génétique de planètes communes. D’ailleurs, même le jour du bac, j'avais apporté des objets sur ma table parce que j'avais peur de me trouver dans une salle de classe qui ne me plairait pas (rires). Je suis rassurée par l'objet.
Sous un dessin de Jean Cocteau, un serviteur muet gainé de cuir par Jacques Adnet.
Le métier me manque...oui, je suis un peu en manque de décors, vous voyez.
TSF
Quand êtes-vous revenue à Nice, Lucillia ?
Lucillia
Je n'ai jamais vraiment aimé Paris et j'ai toujours su que j'allais rentrer un jour. En général, les Niçois finissent toujours par rentrer ! Quand on a grandi ici, c'est dur de ne pas revenir. De mon côté, c’était un peu précipité, les confinements ont accéléré le retour. Mais cela s'est fait petit à petit. Je suis beaucoup mieux ici, j'adore la nature et j'ai vraiment besoin d'être dans un univers comprenant la mer et les montagnes. C'est vital. D'ailleurs, le beau, c'est aussi un paysage, non ? Pas qu'un décor, pas que des objets.
TSF
Comment avez-vous trouvé cette maison ?
Lucillia
Sur leboncoin, en 2018.
Chantal
Oui, 2018, pendant la maladie de papa.
TSF
Donc, vous souhaitiez déménager ?
Lucillia
Au départ, mes parents cherchaient une maison de campagne.
Chantal
Puis quand on a appris qu'Alain était malade, les projets ont changé, mais on a continué à chercher. Cela lui donnait de l'espoir. Parce que parfois, on s'en sort du cancer. En tout cas, quand on a trouvé cette maison, elle nous a plu, elle était sereine. Même si le jardin était dans un état désastreux ! C'était une famille américaine qui vivait là. Elle ne supportait pas la France, mais lui, il avait les larmes aux yeux à la signature.
TSF
Qu'avez-vous voulu faire ici, dans cette maison ? Quelle ambiance avez-vous voulu y créer ?
Lucillia
C'est avant tout une maison familiale où justement il y a du monde tout le temps. C'est important pour comprendre la maison. Pas seulement la famille et les amis d'ailleurs : c'est ici que je réunis des artistes niçois et que j'invite les gens à des ventes privées. À terme, on se dit qu'on pourrait faire des événements plus importants ici. C'est en réflexion. L'idée, en tout cas, c'est d'en faire un lieu de vie constante.
Chantal
Le métier me manque... je suis un peu en manque de décors, vous voyez.
Lucillia
On aime chiner et décorer ensemble. On est très complémentaires : ma mère a plus d'expertise, notamment pour le dessin, le croquis, parfois même la maquette. Elle a une très bonne vision de l'espace. Moi, je ne suis pas manuelle.
TSF
Si vous aviez un conseil de déco à donner à quelqu'un, ce serait...
Lucillia
De toujours conserver l'âme et le thème premiers d'un lieu. Par exemple, si c'est près de la mer, de donner un côté marin. Ça me surprend toujours, quand je vois des gens qui font des intérieurs mexicains alors qu'ils sont dans le sud de la France. Et je pense que le deuxième conseil serait sans doute de ne pas suivre la mode.
Chantal
Eh oui, ça se démode. Et on se lasse.
Lucillia
Et un dernier conseil... y mettre de sa personnalité !
TSF
Justement, comment décririez-vous votre style à toutes les deux ?
Lucillia
Éclectique. Et on n'a pas peur d'être originales ! Toute cette mode autour de la Méditerranée, par exemple, les céramiques colorées placées dans n'importe quel restaurant qui ouvrent à Paris comme ailleurs, ça ne veut plus rien dire. Ça me sort par les yeux. Quand je suis rentrée à Nice, je me suis rendu compte qu'il y avait beaucoup de - vrais - créatifs qui ne se connaissaient pas. Je considère que mon rôle de DA, c'est aussi justement d'aller chercher des talents et de les faire se rencontrer, de les mêler. Par exemple, sur la direction artistique de la brasserie Les Mimosas, j'ai fait appel au cabinet d'archi Studio Lelaz que j'ai rencontré justement à l'un de mes événements.
TSF
Parlez-nous de cette réalisation commune qui est votre salle de bains, ici.
Chantal
La maison ici date de la fin du XIXe siècle. Elle a cette architecture qui se situe aux prémices de la Belle Époque : dans la salle de bains, on a voulu retrouver cette idée, tout en la réinterprétant à notre manière, bien entendu ! D'abord, on a fait des recherches sur les décors de l'époque. Il se trouve que ma fille et moi, nous adorons les salles de bains d'hôtels, de vieux hôtels surtout : on s'en est beaucoup inspirées. J'ai pensé aussi à mon mari qui aimait tant l'une de nos salles de bains réalisée il y a longtemps, blanche et noire. On a mis plus de six mois à la construire, cette salle de bains, tout le mobilier est sur-mesure. Les carreaux au sol sont neufs, mais ils ont cet effet de l'ancien, ce qui dépend beaucoup aussi de la pose. Ils ne sont pas tout à fait droits, parce que ni Lucillia ni moi n'aimons ce qui est droit.
Lucillia
Je crois que je déteste les choses quand elles sont vraiment trop nettes. D'ailleurs, le côté parfait des nouvelles décorations, très léchées, m'angoisse.
Chantal
Nous, on aime la vie !
TSF
Pouvez-vous nous parler d'un objet, d'une œuvre que vous aimez particulièrement ici ?
Chantal
Cette sculpture en bois de Janine Janet, c'est mon mari qui l'a trouvée dans une salle des ventes de la région à la fin des années 1990. Il s'agit de Daphné : son pendant Apollon a disparu. On l'avait exposée à Paris, au Salon des Tuileries. C'était la pièce centrale d'un décor que j'ai réalisé à cette occasion. J'avais acheté des claustras, que j'avais peints en rouge bordeaux, sur lesquels j'avais fixé de grosses roses en tissu rouge. J'avais aussi imaginé des sortes de grandes draperies en pétales. Je ne vous dis pas combien de fleurs, de pétales j'ai utilisé (rires) ! Une année, j'ai reçu le premier prix pour un décor, qui était d'ailleurs un drapé. Ollivier adore depuis toujours les drapés à la galerie. Moi aussi. D'ailleurs, j'aime me draper. Le châle est l'un des vêtements que je préfère. J'aime le geste.
TSF
Quelles sont vos actualités, Lucillia ?
Lucillia
La direction artistique et l'identité visuelle des Mimosas à Nice, pour lesquels j'ai choisi de travailler avec des créateurs du Sud : studio Lelaz, Umami, Léa Ginac... je chine aussi pour eux. Il s'agit d'une brasserie très française : c'est un genre de restaurant qu'on n'avait pas encore vraiment à Nice. Mais l'idée était comme toujours de respecter l'âme du lieu, qui est un ancien cabanon de plage. J'ai pu exprimer pas mal de mes inspirations et choisir tout, du logo à la petite cuillère.
TSF
Avez-vous une pièce favorite de notre collection ?
Chantal & Lucillia
On aime beaucoup le bougeoir blanc Anna qui a vite pris place dans la cuisine !
TSF
Avez-vous quelques bonnes adresses niçoises à nous transmettre ?
Chantal
Mes boutiques fétiche : baobab dans le vieux Nice et trésor public. Et l’incontournable restaurant Davia aux spécialités niçoises.
Lucillia
La brasserie Les mimosas, bien sûr, qui vient d’ouvrir et le restaurant Les œillets.