Chez
Guido Taroni, esprit libre
Se laisser guider par l’émotion. Telle est la philosophie de vie de notre hôte du jour, Guido Taroni. Photographe milanais aux collaborations prestigieuses, le trentenaire est un éternel enthousiaste ! Un passionné de l’œuvre de Piero Fornasetti, intarissable sur la beauté cinématographique du monde qui l’entoure. Épris d’indépendance très tôt, cet esprit libre a été façonné par le fantasque d’un père collectionneur et d’une mère historienne de l’art sur les rives du lac de Côme. Une famille d’esthètes qui lui a légué un héritage culturel et artistique incroyable. En témoigne son loft du quartier pittoresque de Navigli, aménagé dans une cour pavée aux volumes généreux, qui permet au créatif d’abriter une collection d’objets étonnants et exubérants. Avec sa structure métallique scindée – telle une ligne droite – par un escalier industriel, l’espace est doté d’une hauteur sous plafond propice à la création. Un véritable antre artistique au caractère muséal où les amis artistes du jeune homme exposent leurs œuvres aux côtés des siennes. De sa vie de bohème et de voyages nécessaires à sa profession, le poète Guido conserve un hédonisme qu’il s’attelle à retranscrire soigneusement chez lui. Créer la surprise, susciter la curiosité par les couleurs ou par des détails décoratifs fantaisistes : autant de plaisirs simples pour cet italien, dont le lieu de vie est un véritable reflet de la personnalité.
Lieu
Milan
texte
Caroline Balvay
Photographies et Vidéos
Constance Gennari
TSF
Guido, pouvez-vous vous présenter ?
Guido
Je m’appelle Guido, j’ai 33 ans. J’aime la vie, la photographie, la musique, la nature, les amis, rire et faire rire, la table…
TSF
Quel est votre parcours ?
Guido
J’ai grandi sur le lac de Côme, puis j’ai fait des études de langues. J’ai toujours cherché l’indépendance. C’est pour cette raison que j’ai décidé d’aller vivre à Milan ! Après avoir trouvé un logement, j’ai pu faire mes premières expériences dans deux ateliers de photographie : chez Sancassani et chez mon oncle Giovanni Gastel. Peu à peu, j’ai démarché mes propres clients. J’ai beaucoup fait de mariages, de baptêmes et d’événements en tout genre ! Ma première exposition Sogni Sospesi a eu lieu en 2008. J’avais 21 ans. C’était un vrai « cadeau du ciel ». Après elle, ma vision de mon métier a été vraiment plus claire. J’avais enfin trouvé ma façon de voir le monde ! Cela m’a donné encore plus de courage et l’envie d’expérimenter en ouvrant mes horizons.
TSF
Parlez-nous de votre éducation au « beau ». Comment s’est développé votre goût ?
Guido
Beaucoup avec l’observation et l’assimilation de ce que j’ai eu la chance de voir depuis ma naissance. Mes parents aiment les maisons, les jardins, l’art sous toutes ses déclinaisons ! Je crois que grandir entouré par la beauté est très important. Dans un travail comme le mien, c’est indéniablement d’une grande aide ! La beauté, ce n’est pas seulement – et nécessairement – les choses chères. Nous pouvons la trouver partout si nos yeux et nos cœurs ont été éduqués à la voir.
TSF
Et votre amour de la photographie ?
Guido
Je crois que tout a commencé par le besoin intérieur que j’avais d’immortaliser ce qui, a mes yeux, était beau et parfait. Quelques secondes après le « clic » je me sens plus heureux !
TSF
Designers, artistes : quels sont ceux dont l’œuvre a eu une influence sur vous, votre travail ?
Guido
J’aime bien la peinture, la musique. Le surréalisme de René Magritte, l’élégance de Richard Avedon et l’imagination de Piero Fornasetti.
TSF
Comment définiriez-vous votre style ?
Guido
Simple !
TSF
Qu’observez-vous tout de suite quand vous arrivez quelque part ?
Guido
Tout ! Quelquefois, j’ai comme l’impression de vivre dans un film. J’ai la capacité de voir tous les détails très rapidement comme une petite fourmi cachée dans l’angle d’une grande chambre.
TSF
Vous avez visité des intérieurs somptueux pour votre travail. Quel est celui qui vous a le plus marqué ?
Guido
La propriété d’Umberto Pasti et de Stephan Janson au Maroc est un des lieux que j’ai le plus aimés. C’est un vrai paradis ! Umberto a transformé ce coin perdu au nord du Maroc, près de Rohuna, en un véritable jardin d’Eden. Il s’est engagé sans réserve pour défendre la diversité et la splendeur des paysages encore préservés d’une modernisation effrénée. C’est une aventure sociale et humaine unique qui est le fruit d’un dialogue exemplaire entre un Européen libre de préjugés et les habitants d’un village aux coutumes encore ancestrales, qui ont fait cause commune envers et contre tous les obstacles.
TSF
Photographe est un métier de rencontres. Avez-vous un souvenir, une anecdote à nous faire partager ?
Guido
À 17 ans, après un an de travail chez mon oncle, je lui ai demandé d’utiliser son studio. Pour faire mes preuves en quelque sorte ! Je me souviens avoir imaginé une commande d’un client pour réaliser une photographie d’un verre en nature morte. Je me devais de rendre cet objet intéressant à travers la photographie. Tout de suite, j’ai commencé à imaginer ce à quoi cela pourrait ressembler. Puis je me suis dit : « Mais cette façon de voir les choses, c’est la vision de mon oncle Giovanni, pas la mienne ! » Alors je me suis demandé : « Mais quelle est donc la mienne ? » J’ai pris conscience que je n’avais pas de vision propre. Le lendemain, j’ai chaleureusement remercié mon oncle pour la merveilleuse expérience qu’il venait implicitement de m’offrir et je lui ai dit que je devais m’en aller pour faire d’autres expériences. Les miennes !
TSF
Parlez-nous de votre appartement. Pourquoi lui ?
Guido
Parce que même si je suis près du centre de la ville, j’ai l’impression de vivre dans la campagne, entouré par des artistes et des artisans. Je suis dans le quartier de Navigli, le seul dans lequel j’ai jamais vécu. En venant du lac de Côme, j’avais besoin de vivre près de la nature. Ici, nous avons deux jardins communs avec les autres habitants. Quand est arrivé le premier confinement, ça m’a beaucoup aidé !
TSF
Comment avez-vous meublé et décoré votre intérieur ?
Guido
J’aime la coexistence d’objets anciens et modernes. Quand les choses sont de qualité, il n’y a pas de problème ! Ma maison est pleine de couleurs. Je les adore ! Il y a également beaucoup de collections et de bibelots qui viennent des voyages que je fais pour le travail ou bien des cadeaux qui me font voyager à travers des souvenirs. Chaque fois que j’en regarde un, c’est comme si je recevais une caresse de la personne qui me l’a offert.
TSF
Que dit-il de vous ?
Guido
Que l’on doit vivre avec le cœur ouvert à l’émotion ! C’est l’une des choses les plus belles que j’ai apprises et qui m’aide beaucoup dans mon travail.
TSF
Quelle y est votre pièce favorite ?
Guido
Je n’en ai pas ! J’aime tout mon appartement. J’ai des rituels pendant le jour qui me font vivre la totalité de l’espace. J’aime changer de lieu en suivant la lumière du jour !
TSF
Le meuble, l’accessoire, le souvenir (etc.) qui vous suit à travers vos déménagements et auquel vous tenez particulièrement ?
Guido
J’ai des objets avec des histoires très amusantes ! Certains me viennent même de mes ancêtres, du côté des familles de mon père et de ma mère. Les autres, je les ai trouvés lors de mes voyages ou dans des marchés aux puces, mon autre grande passion !
TSF
Vous habitez à Milan. Quelles y sont vos adresses favorites ?
Guido
Ce que j’aime à Milan, c’est que ce n’est pas trop petit pour être provincial et pas trop grand pour ne pas pouvoir traverser la ville à vélo ! J’aime l’Aquario Civico dans le parc Sempione, le restaurant La Libera, l’atelier de Stephan Janson, le restaurant I Binari, la Palazzina Appiani (que ma mère a restaurée), la cathédrale (à chaque fois que je la vois, je reste sans mots, je suis très ému), La Casa Degli Atellani, la Villa Necchi Campiglio. Mais aussi la Terrazza Martini, La Scala. Je pourrais continuer pendant des heures !
TSF
Où vous retrouverons-nous cette année ?
Guido
Niveau voyage, la situation n’est pas facile. Mais j’ai eu la chance de faire un très beau périple en Afrique pour le travail, juste avant le confinement. Et ça m’a beaucoup aidé ! Quand j’avais besoin d’évasion, je n’avais qu’à fermer les yeux et j’étais là, dans la nature la plus sauvage, dans les couleurs les plus vibrantes, avec les étoiles les plus lumineuses…